Mesure mal née
Rappelez-vous. Le 1er juillet 2018, les premiers panneaux « 80 km/h » poussaient sur les fameuses routes bidirectionnelles sans séparateur central malgré la contestation sans précédent qui avait accueilli la mesure. Contestation des usagers - au premier rangs desquels figuraient les motards - mais aussi des élus locaux remontés contre une décision qu’ils jugeaient parisianiste et peu soucieuse des différences territoriales. Le 80 allait mettre le feu au poudre et contribuer à déclencher la durable crise des Gilets jaunes.

La valse des paramètres
Pour tenter de calmer le jeu, Édouard Philippe avait bien parlé d’une « expérimentation », indiquant que si les résultats n’étaient pas là (en l’occurrence 300 à 400 vies épargnées chaque année sur les routes), le 80 serait abandonné.
Reste que cette « expérimentation » a tout de la déclaration d’intention. Déjà très improbable lors de son annonce, faute de disposer des chiffres précis de l’accidentalité sur les seuls tronçons concernés par l’abaissement de la vitesse de 90 à 80, elle est aujourd’hui devenue impossible du fait des crises qui ont émaillé les 24 mois qui nous séparent de l’entrée en vigueur de la mesure. Comment espérer avoir la moindre idée de l’efficacité de cette mesure alors que le France a connu une vague de destruction de radars sans précédent, une grève contre la réforme des retraites qui a massivement entravé le fonctionnement des transports en commun et enfin un confinement de près de 2 mois ? Sans compter tous ces départements qui ont fait le choix de revenir à 90 km/h comme les y autorise la loi d’orientation des mobilités de décembre 2019.

Prolongation de l’expérimentation ?
Édouard Philippe n’aurait toutefois pas renoncé à évaluer la pertinence de cet abaissement de la vitesse maximale autorisée. D’après nos confrères du Point, il « s’exprimera lorsqu’il disposera des travaux de conclusion des deux années d’expérimentation ». Reste qu’ils risquent fort de se faire attendre compte tenu de la période très particulière que nous venons de traverser. À moins que la phase d’expérimentation ne soit prolongée de 2 nouvelles années, ce qui aurait au moins le mérite de lui donner une apparence scientifique, les statisticiens préconisant 5 ans d’observation avant de tirer la moindre conclusion.

La FFMC favorable au retour généralisé à 90
De son côté, la FFMC qui ne cesse de militer pour une vraie politique de sécurité routière - de celles qui considèrent que la survenue d’un accident ne saurait se réduire au seul facteur de la vitesse - serait favorable à un retour généralisé au 90 km/h notamment pour des questions d’égalité entre les citoyens et de meilleure lisibilité des vitesses maximales sur route.
De son côté, le Comité indépendant d’évaluation des 80 km/h demande au gouvernement de mettre fin à l’expérimentation et de « laisser aux élus le soin d’apprécier sur le terrain la dangerosité réelle du réseau secondaire et d’adapter en conséquence les vitesses autorisées ». Rien de plus en somme que ce qu’ils demandaient à cor et à cri dès l’annonce du 80.

Chat échaudé
Il se pourrait bien que leur requête finisse pas être entendue à en croire la récente déclaration d’Emmanuel Macron. Le Président vient de rejeter (pour l’instant) l’autre projet d’abaissement de la vitesse maximale autorisée, à 110 km/h sur autoroute, pour des questions environnementales cette fois en déclarant : « La transition écologique ne doit pas se faire au détriment des communes, des régions les plus enclavées ».

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