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Le délégué interministériel à la Sécurité Routière, Emmanuel Barbe, nous a accordé un long entretien, le 3 novembre. Un mois après le Comité interministériel de sécurité routière (CISR) du 2 octobre, il revient sur les mesures annoncées par le Premier ministre qui concernent la moto.

Nous publions maintenant la partie de l’entretien qui concerne le port obligatoire des gants.

Premiers enseignements :
- le port des gants va être obligatoire, mais la date d’application n’est pas précisée ;
- le défaut de port des gants sera passible d’une amende de 45 €.
- en dehors du casque, le port d’autres équipements de sécurité à moto n’est pas obligatoire, mais cela pourrait suivre.

Quel impact sur l’accidentologie des motards aura l’obligation de porter des gants ? Réduire le nombre de décès ?
Vous pensez que j’ai imaginé une seule seconde que porter des gants sauverait des vies ? La Sécurité Routière n’a pas uniquement pour objet de sauver des vies, mais aussi d’éviter les blessés. Porter des gants à moto ou scooter, c’est le minimum.

Pourquoi une obligation plutôt qu’une incitation ?
Je connais cette antienne, cela fait trente ans qu’elle est défendue par la FFMC. Pourtant la mortalité des motards reste très mauvaise. Et je ne parle pas des blessés graves. La carrosserie du motard, c’est son corps. Il faut inclure dans le problème de la moto la question du sous-équipement, qui est forte. Les gants, c’est une entrée en matière. Le défaut de port des gants sera passible d’une amende de 45 €. Cette mesure va permettre aux policiers d’arrêter un conducteur qui n’en a pas. Ils ne le verbaliseront pas forcément mais le sensibiliseront aux risques encourus.

Plus simplement qu’une obligation, des campagnes de sensibilisation peuvent permettre de faire passer ce message…
Cela fait trente ans que la Sécurité Routière lance des campagnes de sensibilisation, et cela ne fonctionne pas. Je ne comprends pas, quand on est motard, que l’on puisse être contre le port des gants.

La question n’est pas d’être contre le port des gants, mais de les rendre obligatoires…
Les mains sont extrêmement fragiles. Si vous portez des gants dotés d’un minimum de protection, vous réduisez le risque de blessure. Comment peut on être contre ?

Un fois l’obligation prononcée, nous aurons une campagne de communication permettant de l’expliquer. Elle ne traitera pas seulement des gants, mais de l’ensemble de l’équipement. Récemment, nous avons interdit l’oreillette. Et ainsi, attiré l’attention des conducteurs sur le danger de téléphoner en conduisant.

Et sur ce point, j’espère avoir le soutien de la FFMC, dont tous les membres circulent équipés de gants. Le problème, c’est que l’ensemble de la planète motarde n’est pas à la FFMC. Promenez-vous en France et vous verrez le nombre de motards qui ne sont pas protégés.

Est-il déjà prévu de rendre ensuite obligatoire le port de bottes de moto, puis celui du blouson, puis celui d’un pantalon spécifique, comme le préconisait le rapport du préfet Guyot de 2012, « Équipements de protection individuelle des utilisateurs de deux-roues motorisés » ?
Qu’est-ce qu’on m’aurait dit si j’avais conseillé au gouvernement de rendre obligatoire une couverture complète du corps ! Soyons réaliste, commençons par les gants.

Mais je le dis à ceux qui lisent cette interview : il est indispensable de se protéger la malléole. Une blessure à la cheville peut être invalidante. On pourrait tout aussi bien parler du casque : on sait que le casque jet protège mal la face…

Quand on se déplace à Toulon en juillet, on voit des gens circuler en short sur des grosses cylindrées. On me demande de faire de la prévention, mais à un moment il faut être plus prescriptif, aller plus loin et prononcer des obligations. Et je vous dirai mon immense incompréhension si une association de motards s’opposait à cette mesure.

La FFMC demande depuis longtemps des incitations financières, pourquoi pas par l’intermédiaire des assurances, contribuant à faire baisser le prix de l’équipement moto. Pourquoi cela ne fait pas partie des mesures annoncées lors de ce CISR ?
C’est une très bonne piste. Nous avons parlé lors du CISR du renouvellement du contrat avec les assureurs et ce point sera à l’ordre du jour de ces discussions.

Vous renvoyez la balle aux assurances ?
Non pas du tout, j’essaye de trouver des formules nouvelles avec les assureurs, mais je ne peux vous en dire plus. Vous avez raison, on doit arriver à ce type d’opération incitative.

Mais laissez-moi vous dire que, si vous attendez l’incitation de votre assureur pour acheter le bon casque, vous avez tort. Investir dans un bon équipement, c’est investir sur soi-même. Je suis certain que vous en êtes convaincu aussi car vous êtes motard. Rendez-vous compte qu’il y a des gens qui meurent en moto parce qu’ils n’ont pas de casque. Nous avons pris des mesures pour les motards, et pour que cette pratique puisse durer.

Retrouvez les 3 autres parties de l’interview d’Emmanuel Barbe

- Contrôle technique moto : dans deux ans, au prix de 50 à 70 euros
- Le délégué Sécurité routière veut « faire entrer la moto dans une culture de sécurité »
- « Depuis 40 ans on n’a pris aucune mesure pour protéger les motards »

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