En proposant une formation « post-permis » dans un délai de 6 mois à un an après l’obtention du permis de conduire, la Sécurité routière veut s’attaquer « au phénomène (...) de sur-confiance » qui touche les jeunes permis une fois passées les affres des premiers tours de roue.

La Sécurité routière s’appuie sur des expériences similaires menées dans d’autres pays de l’Union européenne, et qui ont démontré l’efficacité de la formation post-permis sur la réduction de l’accidentalité. La mesure, parue au Journal officiel le 3 août 2018 s’appliquera au 1er janvier 2019.
Elle concerne exclusivement les titulaires d’un premier permis (A1, A2, B1 ou B) et pour une formation « post-permis » intervenant entre les 6e et 12e mois qui suivent son obtention, ni avant ni après.

Pour être validée, cette formation devra être suivie dans une auto-école titulaire d’un label reconnu par l’État pour la qualité de leur enseignement. La formation (limitée à une seule journée - 7 heures) sera collective afin de permettre un maximum d’échanges sur les expériences de conduite entre les conducteurs.

Pour la Sécurité routière, le label « qualité des formations au sein des écoles de conduite » répond à l’exigence de qualité. Ce label a vu le jour par décret du 26 février 2018, après plusieurs mois de concertation entre les organisations professionnelles de la conduite et les services de la délégation à la Sécurité routière au sein du Conseil supérieur de l’éducation routière représentant l’État. Il a été validé par le Conseil national de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelle (CNEFOP).

Cette mesure s’inscrit dans la logique du « continuum éducatif » défendu par la FFMC depuis 30 ans. L’Association pour la Formation des Motards (AFDM), la branche formation de la FFMC, a développé et anime depuis 1984 des stages de perfectionnement à la conduite et un réseau de moto-écoles (www.afdm.org).

Pour autant, l’AFDM reste dubitative quant à la mise en œuvre de cette mesure. Pour Pierre Malexis, président de l’AFDM, l’intention de prolonger la formation au delà du permis est utile, surtout à un moment ou le conducteur novice est attentif car pouvant confronter sa formation aux réalités de la conduite qu’il a pu percevoir depuis son permis.
Mais la question du contrôle de la qualité des formations dispensées est centrale. « Malheureusement, avec ces formation non sanctionnées par un examen, l’état a tendance à déléguer à des entreprises privées ses missions, c’est l’Überisation de la société qui en cours poursuit Pierre Malexis. Comment et par qui sera contrôlée la qualité de ces formations, c’est la vraie question ? Sachant que le nombre d’Inspecteurs du Permis de Conduire est déjà insuffisant, il sera difficile de s’assurer que certaines moto-écoles ne proposent pas au rabais des formations de piètre qualité  ».
Pierre déplore la situation : « le permis est devenu un produit, les élèves des clients, qui viennent donc chercher un prix. Et la logique amène ces apprentis conducteurs vers des formations « low cost ». Cette dualité prix/qualité est devenue intenable pour les professionnels qui oeuvrent pour une formation de qualité. »
Quant au coût, mystère ! « Il faudrait déjà connaître le programme prévu réglementairement nous répond Sacha Cerveira, professionnel de la conduite qui représente la FFMC au sein du CSER (Conseil Supérieur de l’Education Routière). La formation sera-t-elle purement théorique, inclura-t-elle un volet pratique ? »

L’intérêt pour un conducteur novice est également limité puisqu’à l’issue des 2 ans de permis probatoire, il aura déjà acquis 10 points, et n’aura plus qu’un an à tirer pour arriver à un permis complet à 12 points. Sachant que pour des infractions mineures (ne coûtant qu’un point de permis), le point est récupéré en 6 mois, l’intérêt devient minimal.
Pour les motards, l’intérêt est encore moindre. D’une part parce que c’est rarement le premier permis passé (à 90% le premier permis passé est le permis B). Mais en plus, avec l’introduction du permis A2, le motard novice doit déjà se payer la passerelle A2 vers A au bout de deux ans. Il est douteux qu’il veuille s’infuser un deuxième volet de formation dans la foulée, tout ça pour gagner deux points sur son permis (qu’il aura de toute façon automatiquement au bout d’un an de plus s’il ne commet pas d’infraction), et pouvoir cruiser à 130 au lieu de 110 sur autoroute.
Pour Sacha Cerveira « Les seuls à pouvoir influer efficacement sur ces conducteurs novices sont les assureurs, comme le fait la Mutuelle des Motards en offrant des ristournes sur les tarifs de ceux qui ont passé le permis A dans une moto école du réseau AFDM, ou ayant suivi un stage de perfectionnement à la conduite. »

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