Enfin, la légalisation de la circulation interfiles (CIF) en France semble se dessiner ailleurs que dans le quotidien des motards en milieu urbain ! Les services de l’État acquièrent du matériel pour compter et analyser le comportement des conducteurs sur les axes qui serviront d’expérimentation. Celle-ci devrait débuter en septembre 2015 et s’achever en 2017, sur quatre axes encore tenus secrets (*). Le Code de la route étant modifié, circuler entre les files saturées de voitures y sera légal.

Nous faisons le point sur ce dossier qui pour une fois met d’accord l’État et les associations de motards, FFMC en tête, avec Jean-Robert Lopez, délégué Sécurité routière du gouvernement.

Les services de l’État sont en passe d’acquérir un dispositif de comptage des 2RM en circulation interfiles. Alors, contrôle ou comptage ?
Comptage. Nous avons besoin de repères, de déterminer le nombre de véhicules circulant entre les files sur les axes concernés par l’expérimentation, mais aussi d’analyser la vitesse des véhicules et le comportement des conducteurs de 2RM (deux-roues motorisés, motos et scooters). Nous ne possédons pas le matériel, il s’agit donc de l’acquérir en vue de cette phase d’expérimentation.

Quel type de matériel est acquis : des caméras de vidéosurveillance fixés sur les portiques Écotaxe ?
Non, on s’oriente vers des boucles de comptage magnétiques installées sur la chaussée. On ne peut les mettre en place qu’au moment où les axes concernés sont fermés à la circulation, ce qui justifie la longue période d’attente avant que l’on réalise l’expérimentation.

Êtes-vous en mesure de nous dévoiler quand celle-ci débutera, et dans quelles localités ?
Les préfets des départements concernés ne sont pas encore informés, et ils seront les premiers à l’être, je ne peux donc vous dévoiler les localités concernées. Je peux juste vous dire que nous mènerons cette expérimentation sur des voies rapides urbaines à caractéristiques autoroutières, enregistrant un trafic automobile congestionné. Là où la CIF se pratique déjà.

J’espère que la phase d’expérimentation pourra débuter en septembre 2015. Les contraintes techniques sont nombreuses. Nous visons une modification du Code de la route par décret, afin de donner un cadre juridique à ce test. Cela nécessite un dispositif lourd et très long. Mais cela signifie aussi que, durant cette phase, la CIF sera de fait autorisée sur ces axes.

L’opération sera-t-elle signalée par un panneau ?
Il n’y aura pas de panneau « Attention CIF », ce n’est pas le but. En revanche, nous tiendrons informés les usagers du déroulement d’une expérimentation dans les départements concernés. Il n’y aura pas de panneau, mais de la communication sur le plan local.

Combien de temps durera la phase de test ?
Entre un an et demi et deux ans, jusqu’en 2017.

Le Premier Ministre, Manuel Valls, s’était engagé en faveur de cette expérimentation quand il était ministre de l’Intérieur. Subissez-vous une pression politique pour que des résultats soient diffusés avant de prochaines échéances électorales ?
Ce n’est pas un sujet politique, mais de sécurité routière et de partage de la route entre des catégories de véhicules. Nous travaillons sur la bonne définition de l’expérimentation plutôt qu’en fonction d’un calendrier électoral.

Si la CIF sera aisément intégrée par les motards, elle risque d’être perçue comme une contrainte par les automobilistes. Comment anticiper un ressenti négatif ?
D’une part, en expliquant qu’elle est déjà pratiquée, et qu’il sera difficile de revenir en arrière. Ce sera mieux pratiqué si c’est encadré.

Lors des débats au Conseil national de sécurité routière (CNSR), en 2013, les représentants des automobilistes ont voté la recommandation de cette expérimentation sans réticence. Mais il est essentiel de définir le cadre du test, afin d’expliquer la modification du Code de la route.

Je rappelle que ce cadre se dessine déjà : la vitesse, en CIF, sera limitée à 50 km/h, elle sera tolérée entre les deux voies les plus à gauche de la chaussée, et dès que le trafic automobile est décongestionné, les motos devront intégrer une file. Il est utile de définir des règles claires afin que vivent mieux ensemble les usagers de la route, et d’obtenir des automobilistes une reconnaissance de la circulation des 2RM.

Pourquoi, en France, ne va-t-on pas aussi vite qu’en Belgique, où la CIF a été officialisée en deux mois ?
Le trafic n’est pas identique au nôtre. Sur les voies rapides urbaines belges concernées, les 2RM représentent 5 % du trafic. En France, il atteint 20 %. Les conducteurs de 2RM représentent 11 % des décès routiers en Belgique, et 25 % en France.

Si, durant l’expérimentation, survient un accident dramatique, cesserez-vous immédiatement l’opération ?
Il s’agit d’une mesure prise en concertation avec les associations de motards. Nous avons mis du temps avant de la décider, elle n’est pas arrivée spontanément, et le cadre expérimental est rigoureux. Nous nous plaçons dans les meilleures conditions pour que l’expérimentation fonctionne.

* Il y a de grandes chances pour que le périphérique parisien soit concerné par cette phase d’expérimentation. De source bien informée, trois autres axes seraient visés, une autoroute arrivant sur Paris, une autoroute urbaine à Marseille et une autre à Lyon.

Dans Moto Magazine n°313 (déc. 2014), lire notre article sur l’acquisition de dispositifs de comptage des 2RM par l’Etat

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