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Quatrième et dernier volet de notre interview vidéo du délégué interministériel à la Sécurité Routière, Emmanuel Barbe, réalisée le 3 novembre 2015.

Après avoir évoqué les trois mesures annoncées lors du comité interministériel de sécurité routière (CISR) le 2 octobre 2015, nous évoquons maintenant avec M. Barbe l’utilité du Conseil national de sécurité routière (CNSR) : un organisme indépendant relancé par Manuel Valls en 2012, grâce auquel a été organisée une vaste concertation dans le but de préconiser des mesures de sécurité routière.

Pendant trois ans de nombreuses réunions de concertation ont eu lieu. En définitive, les associations d’usagers ont-elles été écoutées ? On peut en douter quand on constate que les mesures prises par le gouvernement s’orientent vers des obligations et de la répression, alors que le CNSR semblait prôner prévention et pédagogie. Nous avons demandé au délégué du gouvernement pourquoi cette orientation soudaine…

Premiers enseignements de cette partie de l’interview :
- Le délégué affirme « vouloir protéger les motards »… Comme s’ils n’étaient pas capables de le faire eux-mêmes ?
- Il affirme que : « depuis 40 ans, aucune mesure n’a concerné la moto ».
- Il estime que seul le port du casque intégral devrait être obligatoire, en opposition au port du casque jet.
- Il annonce que le non port des gants sera sanctionné d’une amende de 45 €.

Avec ces trois mesures moto orientées vers l’obligation et la répression, le CISR a-t-il désavoué le CNSR ? Quelle est la motivation du gouvernement : montrer qu’il agit, en réaction aux mauvaises statistiques d’accidents de l’été ?
D’abord, nous avons une augmentation de la mortalité routière depuis 2014 qui est des plus préoccupantes.

Elle a repris en 2014, mais en 2013 elle était historiquement basse…
Oui, mais en valeur absolue elle est encore supérieure à celle des pays voisins. On ne peut se contenter de tels résultats. Mettez un nom sur ces gamins qui étaient à moto et se sont fait tuer. C’est de cela qu’il s’agit. Le débat sur le contrôle technique devient dérisoire.

Si on ne veut plus d’accident, il faut interdire la moto…
Vous défendez une logique du tout ou rien ! Ce que je dis, c’est qu’on aime tellement les motards qu’on veut les protéger. Je trouve anormal que, depuis 1972 et l’obligation du port du casque, et encore pas du bon casque (intégral et jet indifféremment, ndlr), on n’ait pris aucune mesure pour protéger les motards. C’est totalement anormal.

C’est faux : le permis à points, les radars automatiques concernent les motards comme les automobilistes…
Vous savez très bien que les motards, parce qu’ils ne peuvent pas être flashés de face, et parce que c’est très difficile de retirer les points sur le permis (à cause du casque, ndlr), ont un taux de verbalisation très faible sur les excès de vitesse.

Il y a eu récemment une décision relative aux dimensions de la plaque d’immatriculation…
Oui, mais ce ne sont pas des mesures à la taille de l’enjeu. Je le répète, on a 24 fois plus de risque de mourir quand on est à moto, ce n’est pas normal, on doit arriver à des chiffres plus bas.

Revenons au CNSR : le gouvernement fait donc table rase des préconisations de cette instance indépendante ?
Sur les 55 mesures de ce CISR, 85 % sont inspirées plus ou moins directement des travaux du CNSR. Mais en aucun cas le gouvernement n’abdique sa capacité à décider.

On a pris des décisions, dont le futur nous dira si elles sont bonnes ou non, en faveur des motards et non contre les motards. Il s’agit de prévention et non de répression, à l’exception du port des gants qui sera passible d’une amende de 45 €. Il faut faire rentrer les motards dans une pratique beaucoup plus vertueuse.

Pourquoi le gouvernement n’a pris aucune décision sur les infrastructures routières ce 2 octobre ? Dans une commune, le maire peut installer n’importe quel obstacle sur la route, il n’est pas contrôlé. Les rails de sécurité en virage doivent être doublés mais les autorités locales ne le font pas…
Le 26 janvier dernier, le ministre de l’Intérieur a pris 26 mesures de sécurité routière, parmi lesquelles la généralisation des panneaux fusibles sur le bord des routes, qui doivent permettre de supprimer des glissières de sécurité, là où elles sont installées pour éviter que les véhicules ne heurtent ces panneaux.

Je roule beaucoup sur un gros scooter (un Suzuki Burgman 650, ndlr), qui a la puissance d’une moto. À chaque fois que je regarde la route qui m’entoure, je me dis qu’elle est agressive, et que je ferais mieux de ne pas tomber.

Là n’est pas la question. Des obstacles pourraient être évités, des vies sauvées…
Ce travail sur les infrastructures est fait. J’étais à Bordeaux la semaine dernière, avec un moto-club, nous avons emmené le préfet à l’arrière d’une Honda Goldwing pour lui montrer les travaux routiers qu’il reste à réaliser. On ne doit plus aujourd’hui construire une route qui ne soit pas « moto friendly ».

Mais 98 % des routes resteront dangereuses, et il faudra les sécuriser d’une autre façon, en mettant dessus des gens qui savent bien conduire leur moto et qui roulent bien équipés.

Je ne puis qu’encourager tous ceux qui m’écoutent à acheter un airbag moto. C’est un investissement dérisoire par rapport au coût de la vie. Il protège les cervicales, les hanches, le torse… Les gendarmes, qui ont équipé la totalité de leurs motards, ont constaté une baisse significative des lésions.

Les associations représentant les motards vont-elles retrouver une écoute auprès de la Sécurité Routière et des instances du gouvernement qui s’occupent de ce dossier ?
Ma porte a toujours été ouverte aux associations qui représentent les motards.

Retrouvez les trois autres parties de l’interview d’Emmanuel Barbe

- Contrôle technique moto : dans deux ans, au prix de 50 à 70 euros
- Port des gants : l’obligation indolore ?
- Le délégué Sécurité routière veut « faire entrer la moto dans une culture de sécurité »

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