Malgré tous les efforts du gouvernement pour forcer le citoyen à remplacer son vieux thermique, désormais baptisé « véhicule polluant », l’électrique a du mal à se vendre. Tel est l’analyse de Georges Nurdin, économiste, consultant, écrivain et chroniqueur pour Capital.fr

« Le consommateur européen n’est pas prêt à prendre le risque du 100% électrique car les infrastructures ne sont pas prêtes et la revente reste une inconnue » a déclaré Klaus Frölich. L’homme, haut responsable chez BMW, parle en connaissance de cause. La marque allemande s’est en effet trouvée aux avant-postes pour alimenter le marché du véhicule électrique avec sa voiture i3 et son scooter C-Evolution présenté en 2013.

Comme le précise Georges Nurdin, il suffit d’observer les ventes de la Leaf, leader sur ce marché. Nissan n’en écoule chaque année en Europe que 40 000 exemplaires sur un marché global de 15,6 millions de voitures. Un 0,25% d’autant plus anecdotique que cette part de marché est dynamisée par le forcing de nos gouvernants et le discours de plus en plus culpabilisant associé à la possession d’un véhicule thermique.

Loin de céder aux sirènes de slogans prometteurs, l’usager, bien ancré dans le réel, sait à quel point un véhicule électrique est cher à l’achat et ce malgré les aides du gouvernement, d’ailleurs devenues plus restrictives en France ce jeudi 1er août 2019.
La moto électrique peine encore plus à tirer son épingle du jeu du fait d’une offre aussi minimaliste que le sont les subventions octroyées pour son acquisition (2000 € maximum entre le bonus écologique et la prime à la conversion contre 11 000 € pour une voiture ou camionnette électrique). Dans ce contexte, les motards capables de consacrer 33 900 € pour s’offrir une Harley-Davidson LiveWire se comptent probablement sur les doigts d’une main. Sur les 173 327 immatriculations de 2-roues de 125 cm3 et plus enregistrées en France en 2018, seules 211 concernent Zero. Le Californien s’octroie ainsi 0,1% du volume global.


La SR/F, le nouveau roadster de Zero

Autre écueil : des infrastructures de recharge toujours anémiques et indignes des ambitions de nos dirigeants en faveur de la transition énergétique. Le faible maillage du territoire ne permet pas toujours de choisir ses trajets librement. L’autonomie très limitée en comparaison d’un moteur thermique reste l’un des défauts majeurs de ces nouveaux véhicules.
« Vous devez payer pour l’autonomie, et c’est ce que les gens ne comprennent pas » déclare Klaus Frölich. « Sur l’électrique, la différence de prix se fait sur la performance et l’autonomie. L’écart entre 350 et 600 kilomètres d’autonomie est de l’ordre de 10 000 €. Mettez les deux versions en vente et vous verrez combien de personnes achèteront la version 600 km. Toute cette discussion sur l’autonomie est absurde car c’est avant tout un choix dicté par le budget que vous êtes prêt à y consacrer » indique Klaus Frölich de BMW.

La véhicule électrique, vraiment écolo ?
S’il est acquis qu’il émet peu de pollution gazeuse en roulant, « il se « contente » de déplacer la pollution plus en amont, là où cela se voit moins, voire pas du tout, c’est-à-dire au niveau de la production d’électricité » précise Georges Nurdin. Au chapitre des micro-particules son bilan n’est pas neutre non plus puisqu’il use plaquettes et pneus comme n’importe quel véhicule. Il faut enfin prendre en compte la pollution engendrée pour fabriquer les batteries, une filière pointée du doigt par Amnesty International pour son manque d’éthique. Leur transport impose aussi de consommer du carburant pour alimenter les porte-conteneurs et avions. Nous émettons donc de la pollution en masse au niveau planétaire pour satisfaire l’absence de pollution « au bout du tuyau d’échappement » en Europe. Marche-t-on sur la tête ? C’est fort probable.

L’électrique n’a de sens que s’il reste marginal
La marginalité du véhicule électrique doit donc être envisagée comme une bénédiction selon notre analyste car il serait absurde d’imaginer que notre parc vieillissant de centrales nucléaires puisse supporter la « charge » de dizaines de millions de véhicules « propres ». Cela imposerait de construire encore plus de centrales en France, ou encore plus d’usines à charbon en Allemagne pour satisfaire la demande aux heures de pointe…

D’après Enedis, la consommation pourrait grimper jusqu’à 10.2 GW si 9 millions de véhicules électriques se branchaient au même moment. Nous vous laissons imaginer le résultat à terme, tant d’un point de vue économique qu’écologique.
Aussi, un plein de « carburant » pourrait coûter bien plus cher si le « véhicule propre » devenait majoritaire du fait du remboursement de la dette liée à la construction de centrales, d’usines et d’infrastructures de recharges, avec une TVA à faire pâlir Total ou Esso.

Bien sûr, le moteur thermique pollue, c’est un fait. Mais le véhicule électrique est loin d’être la solution. Il est proposé sans aucune réflexion vers l’avenir, sans doute pour satisfaire des intérêts industriels et politiques.

Le « leasing » du 2-roues en milieu urbain, l’avenir le plus pertinent pour le véhicule électrique ?

Si la mobilité électrique à un avenir, il est probablement à chercher dans ces petits déplacements urbains et péri-urbains. L’aspect pratique du véhicule électrique - 2-roues en tête - prend en effet tout son sens en ville du fait de son silence de fonctionnement et des courts trajets qui y sont généralement effectués. Voilà qui explique le succès de Cityscoot et de Coup, les deux entreprises de location de scooters électriques en free floating qui dispensent l’usager de se préoccuper de la question de la recharge.
La possibilité de recharger facilement son véhicule à son domicile ou sur son lieu de travail explique aussi le succès de la solution de leasing proposée par BMW pour son C-Evolution.

Le 2-roues est l’avenir de la ville
Le 2-roues a alors une carte évidente à jouer ici du fait de son faible poids et de ses dimensions contenues qui représentent autant d’atouts pour fluidifier la circulation en ville. Vouloir par contre remplacer 100% des déplacements thermiques au niveau national par de l’électrique est un non-sens écologique. La FFMC relayait d’ailleurs, le 19 juillet dernier, un rapport de l’ANSES confirmant le fait qu’une augmentation des 2-roues dans le trafic, équilibrée avec une diminution des véhicules particuliers, produirait moins de pollution et moins de congestion de la circulation. Ce rapport recommande donc une croissance de +50% du trafic deux-roues essence et électrique, avec -25 % de voitures particulières, -20% de véhicules utilitaires légers et camions, compensée par +75% de trafic bus diesel et électriques.

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