Comparatifs

La BMW 1200 HP2 (Haute Performance et 2 pour le bicylindre) a été pensée par division d’ingénieurs formés uniquement pour ce projet. Réalisée sur la base de la R 1200 GS, elle n’en a finalement gardé que le moteur, bien que retravaillé pour moins d’inertie. La partie-cycle, elle, est inédite : plus légère, dotée d’une fourche traditionnelle et d’un surprenant amortisseur pneumatique. De son côté, KTM a bâti sa 950 Super Enduro autour de son fougueux bicylindre LC8 qui propulse déjà son supermotard, son roadster et son trail. Dotée d’un cadre treillis très rigide, d’une boucle arrière en alu et d’un combiné de suspensions Withe Power, elle offre une conception mécanique plus classique que sa cousine… germaine. Mais elle bénéficie du savoir faire de la maison en matière de moto verte.

Prise en main : Décor grandiose.

Pour réaliser ce test « grandeur nature » nous avons profité de notre contact avec nos collègues sud-africains de Top Bike. Nous nous sommes donc envolés pour Johannesbourg pour un raid de 4 jours entre la capitale et le lac Sibaya qui jouxte l’océan Indien, soit plus de 2 000 km de pistes sablonneuses, de tôle ondulée et de sable mou à travers de magnifiques paysages alternant vastes plaines désertiques, forêts d’eucalyptus et champs de cannes à sucre. Et pour ne rien rater de nos montures d’exception, nous nous sommes arrêtés brièvement au centre de conduite Off Road – BMW du charismatique Jan du Toit, près de Sanderton. Le but, profiter des multiples pistes dédiées à la découverte ou au perfectionnement de la conduite TT : bosses, pistes rapides, ovale pour la glisse etc. Un must. Si Paris souffrait de la canicule lors de la réalisation de ce comparatif, Johannesbourg grelottait aux aurores avec un tout petit 5 degrés au-dessus du zéro. Normal, c’est l’hiver. Un contraste qui a rendu les premiers kilomètres difficiles pour sortir de la ville avec ces machines dépouillées, sans protection et au confort plutôt spartiate ; d’autant que ces basses températures figent significativement l’huile des suspensions, accentuant leur dureté.

Comportement : Tailles de girafes.

Au guidon de ces Roll’s de l’enduro, un pilote d’1,80 m trouve immédiatement sa place. Les jambes ne sont pas pliées et les grands guidons reviennent convenablement vers les avant-bras. Seules les selles (fines) rappellent à chaque instant qu’elles sont faites pour une conduite… debout ! Finalement, le plus difficile reste le départ. Avec une hauteur de selle de 920 mm, il faut tenir la moto du bout du pied avant de s’élancer ou démarrer « à la facteur », comme le faisait Gaston Rahier au Dakar sur sa BMW R 900 R. Très vite, les pistes arrivent et la position assise se transforme en un lointain souvenir. Avec de telles cylindrées, les premiers kilomètres, effectués prudemment, incitent à l’humilité. Le pilote a le sentiment de conduire en sous-régime. S’il est en effet facile de tirer sur les gaz sans se faire peur avec un monocylindre, ici, l’exercice n’est pas sans risque… à moins d’être parfaitement inconscient. Sur ces pistes dures, la confiance vient petit à petit et la vitesse avec.

Moteur : Sauvage la Katé

Les premières difficultés mettent déjà en lumière la différence de tempérament de nos deux bicylindres. Si BMW a revu toute la cinématique de son flat twin pour le rendre plus agressif à l’ouverture des gaz, il est toujours plus doux à solliciter que son cousin autrichien. Un vrai lion, ce LC8 ! L’absence d’inertie à la coupure comme à la remise des gaz incite à en donner un peu plus lors des relances. Du coup, la conduite est beaucoup plus hachée avec la KTM… Mais cette fougue trouve immédiatement son intérêt quand le sable devient mou, car chaque coup de gaz relance la moto en la replaçant sur cette surface peu fiable. Un caractère entier qui finit par tirer franchement sur les bras en fin de journée. Avec le twin de la BMW, on doit plutôt compter sur le couple, plus important, pour s’extraire du sable. Et si la conduite est moins heurtée, elle demande une meilleure anticipation du terrain. Au final, la KTM se montre plus facile à emmener par un conducteur d’un niveau moyen sur les surfaces difficiles. Les experts apprécieront le twin de la BMW pour sa douceur de fonctionnement et son couple impressionnant.

Malgré ces qualités, l’imprévu guette à chaque instant quand les engins prennent de la vitesse. Lancée à plus de 120 km/h sur une piste bordée d’eucalyptus, la BMW se met à guidonner virilement, allant de butée en butée sur une bonne dizaine de mètres ! Et quelques kilomètres plus loin, même topo avec la KTM. Moralité, si ces machines sont taillées pour aller vite, elles ne sont pas si royales que cela sur le passage de trous importants, surtout si l’on a le malheur de soulager légèrement les gaz au moment de les franchir. Pour adopter un rythme soutenu, il faut une expérience et un physique en béton, vous l’aurez compris.

Les suspensions de ces engins ne représentent pas moins le top en la matière. La BMW possède notamment un amortisseur pneumatique qui peut être réglé sur le terrain à l’aide d’un petit niveau à bulle fixé sur le cadre et une simple pompe embarquée. Sur sol meuble, la HP2 fait preuve d’une agilité et d’une stabilité remarquable pour son gabarit imposant. Avec son flat, elle jouit d’un centre de gravité placé bas qui aide franchement à garder son cap. Avec la KTM, le pilote doit privilégier avant tout une bonne vitesse de passage car la Super Enduro est délicate à faible allure (poids haut perché) malgré un très bon rayon de braquage. Quant aux freinages de nos bolides, ils doivent être jugés sur piste et non sur route où leur puissance se montre un peu juste (un seul disque à l’avant). Celui de la BMW est parfait à l’avant alors qu’il se montre difficile à doser à l’arrière. Par contre, l’étrier avant de la KTM de notre essai s’est révélé spongieux à l’attaque, gênant sur les ralentissements d’urgence.

Verdict

Nos deux enduros XXL sont à la pratique du tout-terrain ce qu’une MV Agusta F4 1000 est à la pratique du circuit : des machines d’exception. Une personnalité qui induit un usage restreint tout comme un prix d’achat élevé, voire dissuasif pour la BMW, 17 250 €, contre 11 750 € pour la Katé. Mais si l’on a l’opportunité (ou les moyens) de les emmener sur de larges pistes roulantes ou sur des terrains sablonneux (et accompagné d’un camion-citerne !), elles offriront là un plaisir à la hauteur de leur exclusivité. La KTM 950 Super Enduro démontrera la fougue de son moteur et sa grande capacité de franchissement. La BMW 1200 HP2 ravira par son look de prototype, son couple impressionnant et son excellente stabilité sur les surfaces meubles. Le plus dur, finalement, est de trouver les espaces où ces bolides puissent s’exprimer, avec assez de pompes pour les nourrir.

Avec la participation d’Olivier Terra et Philippe Guillaume, rédacteur en chef de Top Bike (Afrique du Sud).

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