On en parlait en 2017 sur Motomag : la Sécurité routière capitalise sur le développement de voitures-radars privées. Déployées en Normandie depuis 2018, mais aussi en Bretagne, dans les Pays-de-la-Loire et le Centre-Val-de-Loire cette année, elles sillonnent actuellement lesdites régions en quête d’usagers en excès de vitesse. Comme leur nom l’indique, des opérateurs privés sont à leur volant.

Équipées de radars automatiques et s’ajoutant aux 302 voitures-radars des forces de l’ordre, elles seront 220 en plus à la fin de 2021. Comme un malheur n’arrive jamais seul, elles couvriront quatre autres régions dès le second semestre : Grand-Est, Hauts-de-France, Bourgogne-Franche-Comté et Nouvelle-Aquitaine. Un total de 450 véhicules de ce type opérerait courant 2023.


“Black Mirror" dans le rétro

voiture radar caméra {JPEG}

Guidés par un GPS, les chauffeurs privés à leur bord officient six heures par jour sur une centaine de kilomètres. Ils doivent réaliser des trajets préenregistrés sur des axes routiers considérés comme accidentogènes, avec verbalisation automatique des usagers en infraction. Ces parcours sont établis sous l’autorité des forces de l’ordre et des préfectures locales.

Fonctionnant par infrarouge et sans flash, les radars autonomes sont placés à l’avant et à l’arrière des voitures. Pour les vitesses inférieures à 100 km/h, une marge technique de 10 km/h est établie, contre 5 km/h pour les radars fixes.

voiture radar plage arrière {JPEG}

Avec ce dispositif redoutable, la Sécurité routière souhaite, dit-elle, libérer et orienter police et gendarmerie vers d’autres interventions, tels que les contrôles d’alcoolémie et de stupéfiants. Elle justifie également son développement en pointant le fait que les radars fixes sont souvent vandalisés…

« Quand un automobiliste commet un excès de vitesse, il faut l’arrêter, le sanctionner et faire de la prévention, a réagi Pierre Chasseray, délégué général de l’association 40 millions d’automobilistes. Avec des radars embarqués, on ne fait que du chiffre, on le laisse filer sans autre procès. » De son côté, Chantal Perrichon, présidente de la Ligue contre la violence routière, estime sans suprise que « Ce système est la meilleure arme à déployer aujourd’hui pour contraindre celles et ceux qui ne respectent pas le Code de la route à le faire ».

La politique répressive instillant la crainte d’être verbalisé pour quelques km/h de trop, yeux rivés sur le compteur, peu importe le lieu ou le moment, n’est décidément pas près de s’éteindre... Dans le même temps, quid de l’état du réseau routier et de la prévention… ?


Les voitures-radars bientôt visibles ?

Une quarantaine de députés de l’Assemblée nationale ont cosigné une proposition de loi visant à rendre visible ces véhicules-radars (gyprophare, bande jaune fluo...). « Les chauffeurs n’ont aucun moyen d’intervenir dans une situation dangereuse, d’intercepter un chauffard qui roule à très grande vitesse. N’ayons pas peur des mots : c’est une pompe à fric », martèle Pierre Cordier, député LR, instigateur de la proposition de loi. Un pansement sur une jambe de bois ?

On parle souvent, en bien comme en mal, de "l’uberisation" progressive de notre société. Derrière ce terme, des sociétés privées emploient des particuliers flexibles en charge de diverses missions (livraison et transports, notamment). Connectés à Internet et rémunérés à la course, les clients les sollicitent généralement sur des plateformes numériques installées sur leur téléphone mobile.

Topo quelque peu similaire ici : des sociétés privées emploient des chauffeurs en leur fournissant des berlines courantes sur le marché (Peugeot 308, Dacia Sandero...), équipées de radars entièrement autonomes. Seuls sont acceptés les titulaires d’un permis ayant au moins 10 points, d’un casier vierge et d’une expérience de conduite probante. L’une des entreprises évoquée délivrerait un salaire de 22 000 € par an, soit 1400 euros net mensuel.


Pas de prime au rendement, d’après l’état

De son côté, la Sécurité routière précise qu’aucune prime n’est prévue au nombre de verbalisations ou à la performance. Les chauffeurs et les entreprises privées ne sont pas non plus habilités à saisir les données récoltées par les appareils embarqués. Cryptées, celles-ci sont transmises aux services de police et de gendarmerie en charge des verbalisations, au Centre automatisé de constatation des infractions routières (CACIR).

« Ce sont les médecins, les pompiers, les urgentistes qui sauvent des vies sur les routes, pas les radars. Comment ces contrôles supplémentaires vont-ils infléchir l’augmentation de blessés et de tués chez les usagers fragiles ? », commentait France Wolf, mandataire CNSR pour le bureau national de la FFMC. C’était avant l’entrée en service de ces voitures-radars privées. Ces propos peuvent-être repris aujourd’hui tels quels.

Sources : leparisien.fr, lefigaro.fr

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